Petit matin
Rarement je profite de la beauté des premières lueurs.
Mes premiers levers de soleil furent lors de la procession des Croix, que mon village entreprenait collectivement tous les derniers dimanche de Mai. Curieusement, ce n'était pas vraiment une fête religieuse, autant que le souvenir civique d'un prêcheur de génie ayant visité le village au quatorzième siècle : Bernardino da Siena.
Vraie ou fausse visite, je ne sais, mais ce saint frère prêcheur trouve encore beaucoup de dévots dans les montagnes piémontaises, lombardes, et du Tessin. Il avait, paraît-il, un côté laïque et novateur pour son temps, donnant autant de guides pratiques sur la conduite des affaires que de preceptes moraux pour vivre une bonne vie. L'au-delà viendrait après. Il est frappant comme mon village et les communes avoisinantes s'enflammèrent pour la Réforme deux siècles plus tard, à l'instar du proche Tyrol, avant de se faire massacrer dans un épisode méconnu des Guerres de Religion.
Pour moi, la procession était avant tout le départ à quatre heures du matin de la place de l'église, dans le noir, pour trouver les premières traces de l'aurore rose à Sainte Marie de Ligone, un hameau en hauteur où la messe était dite dans la jolie petite église de la Contreréforme.
En arrivant, le "Don" disait ses litanies en latin dont je ne comprenais pas grand' chose, sauf vaguement cette invocation à la Stella Matutina qui, par magie, était prononcée au moment même où la belle et blanche Vénus accompagnait le Soleil au-dessus des reliefs alpins.
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